L'INCONNU DE LA TABLE BASSE

DECO, LIVRES

Ce livre n’est qu’un symbole. Les oiseaux disparus d'Amérique dans l'oeuvre de Jean-Jacques Audubon aurait pu être un bon roman d’Arto Paasilina. Ce n’est malheureusement qu’un "beau livre", ayant davantage sa place dans la rubrique déco que dans la rubrique littéraire.


Jean-Jaques Audubon est donc un Buffon ornithologique, un « Bird biographe », arrivé au Nouveau-Monde en 1802. Il peindra et décrira les oiseaux d’Amérique pendant toute sa vie. des centaines d’aquarelles scientifiques et autres descriptions artistiques en découleront. Voici pour le sujet. L’auteur, Henri Gourdin est, lui, biographe... Puis, presque 50 € plus tard... Diable, c’est vrai que c'est beau! tristement beau…

Tristement, parce que Jean-Jaques Audubon et ses piafs ne sont que les victimes collatérales du système de classification éditoriale. Libraires, auteurs et éditeurs l’on plumé, lui, eux, nous et les autres. 50 € pour un objet plus que pour une œuvre. Et le malheur c’est que lui non plus n’a pas échappé à son destin… Il a fini, lui aussi, devant le canapé.

Hommage à ce « beau livre » et à ses congénères, sacrifiés sur l’autel de la table basse…


Ouvertement ouvert, comme si l’on venait de s’y plonger, à l’affût de culture, d’esthétisme et de notes de bas de pages, il arbore ses grandes photos, ses longs textes traduits en quatre langues dans une police minuscule.

Il s’offre au buveur d'apéro de passage, nonchalant et étudié, comme une nuisette innocente au décolleté minutieux. Il ne sert à rien, le gros bouquin. Il est là et le fait savoir. Il est comme ces écrans de télévision creux et factices qui hantent les magasins d’ameublement. Il s’exhibe, symbolise, conceptualise, intellectualise les intérieurs. Il ne sert à rien. Il pèse son pesant d’arbre dans son beau papier glacé.

Design roumain au XVIIIème siècle, sex-toys, stylisme neo-underground, cabanes du monde entier, pointillisme, surréalisme, hexofigurationnisme. Il ne dit rien de lui. Il est le bout de musée que l’on emporte avec soi et qui mieux qu’une longue diatribe atteste qu’on y a mis les pieds. Il se feuillette à peine, se regarde en coin, et pleure toutes ses jolies pages qui resteront dans le noir.


Il est la femme superbe, inabordable, aimée au travers de fantasmes dont elle n’est que le sujet et jamais l’invitée. Il est seul, au fond, dans sa couverture en carton classe. Il a remplacé les classiques, la Pléiade, les génies trop géniaux. Il envie le vieux livre de poche qui se fait trimbaler, fripé, d’étagères en sacs à main, de mains, en mains, en cartons, en mains, en étagères. Désormais, il reste là et se morfond, le putain de gros bouquin... Eloge du beau, du cher, de l’inutile et de la déco toute puissante.

Photo : Les oiseaux disparus d'Amérique dans l'œuvre de Jean-Jacques Audubon, Editions de la Martinière. D.R.

1 commentaire:

G.C. a dit…

pour les internautes attirés par le nom d'AUDUBON ,je signale un livre type poche de Claude Chebel,journaliste et producteur dans les émissions de Jean Marie Houdoux "bonjour tout le monde" et "intermezzo" (france inter) sur Audubon .
J'aime beaucoup les billets d'humeur de votre blog .